“Arrêtez de vous chamailler!»
“Arrêtez de vous chamailler!»,a-t-on coutume de répéter aux enfants. Pour autant,une fois adultes, on n’en a pas fini avec les querelles. Les dissensions font partie de notre quotidien, s’invitant régulièrement dans notre vie conjugale, amicale ou familiale, certaines pouvant même mener à la rupture. Pourtant, si douloureuses soient-elles, la plupart nous aident également à mieux nous connaître et à apprivoiser nos différences. À condition, bien entendu, de savoir passer l’éponge. Comment renouer le contact lorsqu’on a échangé des mots blessants ? Faut-il oublier sa colère ou parvenir à l’exprimer autrement? Bien se disputer, cela s’apprend,mais se réconcilier aussi. Explications.Le temps est notre allié. Si les hommes viennent de Mars et les femmes de Vénus, leurs différences ne sont sans doute jamais aussi flagrantes qu’après une bonne engueulade. Face aux critiques, les hommes préfèrent souvent fuir la discussion et se replier dans leur coquille. Les femmes, elles,ont plutôt besoin de parler pour conjurer leur tristesse et se rassurer sur la solidité du lien qui les unit malgré tout à leur conjoint. « Des études ont démontré que, lorsque la conversation se charge en émotions, le rythme cardiaque et la pression artérielle d’un homme font un bond. II essaie d’abord de se défendre puis cherche à s’isoler. C’est alors que, chez la femme, le rythme cardiaque s’emballe : son corps sécrète du cortisol et elle a besoin de discuter pour apaiser son stress », résume Yvon Dallaire, psychologue, thérapeute de couple et auteur de Conflits et disputes dans le couple, comment les gérer? (éd. Québec-Livres).
Si chacun campe sur ses positions, c’est l’escalade assurée. Mieux vaut par conséquent laisser passer quelques heures – ou quelques jours – avant de reprendre 1’échange, le temps de revenir à une charge émotionnelle et à un rythme cardiaque plus raisonnables.En finir avec notre cerveau primitif« Quand mon compagnon fuyait les disputes,au début de notre vie commune, cela me rendait folle, je le traitais de lâche, ce qui, évidemment, ne faisait qu’envenimer la situation,raconte en souriant Florence, 56 ans. Avec les années, j’ai changé ma grille de lecture. J’ai compris qu’il est beaucoup plus mal à l’aise que moi avec l’expression des émotions, ce qui ne l’empêchera pas pour autant de réfléchir à ce qu’on s’est dit. Lui laisser du temps pour digérer un début de dispute est finalement beaucoup plus efficace que de chercher à vider son sac jusqu’au bout.
D’après Yvon Dallaire, un homme fuit l’affrontement comme il décampait autrefois devant un tigre pour éviter d être dévoré : il réagit avec son cerveau primitif, obéissant à un atavisme lié à son sexe. « Lorsqu’il s’enferme dans le silence, ce n’est pas parce qu’il rejette sa partenaire, mais parce qu’il ne veut pas se battre avec elle», assure le psychologue, qui essaie souvent, en thérapie de couple, d’aider chacun à changer de regard sur le comportement de son conjoint. Cependant, l’éducation des protagonistes joue également un grand rôle : le rapport au conflit diverge selon la culture familiale. « Certains ont vécu dans une famille de taiseux, d’autres avec des parents qui se disputaient fréquemment mais sans que cela porte à conséquence. Chacun arrive dans le couple avec un bagage très différent, ce quiva nécessiter quelques ajustements », commente Camille Rochet, psychologue et thérapeute de couple*, auteure de L’amour commence après trois ans (Inter Editions). On est tous ego ! Une prise de bec ne se vit pas de la même façon pour l’un et pour l’autre. « C’est pour quoi il est si important de parler de ce qu’on a ressenti et d’essayer de comprendre e qui s’est passé pour son interlocuteur. Personne n’aime le clash : si l’autre a réagi ainsi, c’est sans doute qu’il avait une raison pour cela, même si on ne l’a pas comprise», assure Camille Rochet. C’est en règle générale l’ego qui brouille nos réconciliations, la certitude d’avoir raison alors que l’autre est évidemment dans son tort…«Dans un couple, on a toujours le choix entre avoir raison et être heureux», résume avec humour Yvon Dallaire, lui-même marié de puis quarante-huit ans. «Même si je n’ai pas forcément changé d’avis sur le fond, je pré sente souvent mes excuses pour la manière dont j’ai dit les choses, pour la peine que j’ai pu faire ou bien pour cette tendance que j’ai à interrompre mon mari sans le laisser fïnir ses phrases », reconnaît Isabelle, 60 ans. II n’est pas déshonorant de faire le premier pas : c’est, au contraire, une preuve de maturité
Communication non violente,
une bonne sortie de secours!
Processus élaboré par le psychologue américain Marshall Rosenberg dans les années 1970,la communication non violente (CNV) remet de l’empathie au cœur de nos engueulades. Voici les quatre étapes qui peuvent nous aider – à froid, une fois la crise passée – à tirer parti de nos querelles pour avancer ensemble.L’observation. Décrivez les faits qui posent problème, sans émettre de jugement. Par exemple: «Hier, tu étais en retard de vingt minutes à notre rendez-vous.»Le sentiment. Exprimez les impressions que cette situation provoque en vous et écoutez le ressenti de votre partenaire.Restez sur le «je » et évitez le «tu »,accusateur. Dites «Je me sens triste et énervée», «Je me sens délaissée» plutôt que «Tu n’es pas fiable», «Tu ne fais pas d’efforts pour moi». Le besoin : Chacun peut exprimer l’attente dissimulée derrière l’émotion qu’il ressent: «J’ai besoin de pouvoir m’organiser sans perdre mon temps», «J’ai besoin d’être sûre que je compte vraiment pour toi ».La demande/la résolution. Formulez un souhait concret et positif de changement: «Peux-tu me prévenir par texto lorsque tu réalises que tu vas être en retard?»
De l’impossibilité d’être toujours d’accord
II n’est pas toujours facile d’exprimer sa peine ou sa colère sans monter dans les tours. Par
fois, 1ecrit aide à dire plus posément ce qu’on ressent. « Avec mon amie Caroline, nous nous étions brouillées et je ne savais pas comment renouer le contact, d’autant que nous n’avions ni amis ni activités en commun permettant de nous recroiser par hasard, se souvient Maud,63 ans. J’ai fini par lui écrire une lettre, ce qui s’est révélé une très bonne idée. Ma démarche l’a touchée : elle y a vu la preuve que je tenais à notre amitié. » Quelques jours plus tard, Caroline l’a rappelée et elles ont pu discuter plus sereinement. Certains conflits (peut-être pa tous…) valent aussi la peine qu’on en reparle,à froid, dans un moment plus détendu, un lieu tranquille où l’on ne sera pas interrompu. Derrière le reproche que nous adressons à l’autre,il y a souvent un besoin insatisfait qu’il faut tenter d’exprimer en respectant, dans la mesure du possible, quelques règles de base : garder son calme, éviter de couper la parole ou de généraliser, parler de soi au lieu d’accuser l’autre, se montrer constructif…« C’est important de ne pas laisser pourrir les disputes sans jamais en reparler, note Camille Rochet. Si des points essentiels sont tus, cela va tout envenimer et on va finir par se disputer pour des broutilles (les chaussettes qui
https://yvondallaire.com/pdf/Discuter_sans_se_disputer.pdf
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